LETTRES 1 (1914-1926)

Recueillies par August Derleth et Donald Wandrei
Choix, préface, chronologie, bibliographie et notes
par Francis Lacassin
Traduit de l’américain par Jacques Parsons
Tome I
(1914 – 1926)

Il est (presque) permis de dire que la correspondance fut pour Lovecraft une activité littéraire importante, autant, parfois plus, que ses textes d’imagination. Le nombre précis de ses écrits dans ce domaine se situe entre quelques dizaines de milliers et cent mille. Sont intégrés à ces chiffres l’intégralité des formes et support possibles, du court billet à la missive de plusieurs pages, en passant par les cartes envoyées de ses villégiatures.
Production irremplaçable pour connaître, et comprendre le natif de Providence tant il y parle de lui, de sa vie, de ses rêves, de ses contes et du reste. Ainsi apparaît-il devant nous, véritable sans doute, authentique peut-être. Un auteur est-il toujours sincère dans son courrier, sans penser à une postérité possible mais à l’image de lui qu’il souhaite donner à son correspondant. Il revient sur son enfance, son hérédité, sa famille, se confie. Un témoignage parfois à charge mais toujours intéressant pour voir l’homme derrière l’écrivain, dégagé des masques que d’autres posèrent sur lui.

Dès 1898, dans sa maison natale du 454, Angell street, Howard prend la plume. Dès cet âge il reconnaît ne plus croire au surnaturel, y incluant la foi chrétienne dans laquelle sa famille s’enferme. Les miracles de la Bible l’ennuie, il leur préfère les prodiges amoraux et flamboyants de la mythologie gréco-romaine.

À la différence des enfants de son âge il vit la nuit, dort le jour, observe le ciel quand ses camarades grimpent aux arbres, édite un  »journal » polycopié. Quand ils jouent lui préfère son laboratoire de chimie et les déclinaisons latines. Plutôt qu’a la séduction des fillettes de son âge il cède à celle des volumes anciens de la bibliothèque des Phillips dans lesquels il a découvert la sexualité et la reproduction humaine. Dès lors ceux-ci ne présentèrent plus aucun intérêt pour lui.
En 1914 il entame sa correspondance avec les membres de l’association d’écrivains amateurs qu’il vient de rejoindre. Il y reconnaît que pour lui l’Histoire s’est arrêtée en 1776, se présente comme un Ancien perdu dans une époque qui ne lui correspond pas. Il n’a que 24 ans ! « Tout ce que j’aimais est mort depuis deux siècles ou deux millénaires. Je ne suis nulle part à ma place » (octobre 1916). il observe ses contemporains comme il regarde les étoiles, de loin : « Lorsque je me dissocie de l’humanité et que j’examine le monde je peux analyser avec plus d’exactitude des phénomènes qui, de près, me dégoûteraient » (16 mai 1926) « Je n’appartiens pas au monde. J’en suis le spectateur amusé et quelquefois dégoûté. Je déteste la race humaine avec ses faux-semblants et ses grossièretés » (Février 1924). « L’homme est issu d’une détestable vermine – une malédiction sur cette planète ou tout au moins un incident banal sans signification profonde » (7 février 1924).
Posture d’un homme d’autrefois qu’il reconnaît dans une lettre à Clark Ashton Smith « J’aurai 33 ans le mois prochain et je joue déjà le rôle du vieux gentleman tranquille, bienveillant. […] Je me suis demandé si rien dans l’existence ne méritait le sacrifice de la simple placidité et la liberté à l’égard des émotions fortes, et j’ai ainsi végété très tranquillement, en étant plus un épicurien dans le sens historique strict qu’un hédoniste de l’école d’Aristippe de Cyrène – ce que semblent être la plus grande partie des modernes' » (30 juillet 1923).
Il sème des citations latines à des correspondants ignorants de cet idiome, étale sa culture en faisant allusion à des auteurs et autres personnages historiques arrachés à des livres que nul homme de son temps ne devait connaître. Jouer le vieil érudit semble le ravir, bien que ses commentaires fussent parfois erronés. Quand il évoque son labeur sur Épouvante et surnaturel en littérature il lui arrive de se tromper, de recopier ce qu’il lut sur des œuvres qu’il ne parcourut jamais. Visiblement il connaît mal la littérature française, sauf peut-être Théophile Gautier qui avait été traduit en anglais.

Quelques exégètes virent, ou plutôt, voulurent voir, en lui un initié à des savoir prodigieux et cosmiques, dans ses lettres il s’affirme volontiers un « matérialiste absolu […] sans une parcelle de foi dans aucune forme de surnaturel ». Il ne craint pas de moquer l’occultisme « un culte de timbrés s’adressant à des marginaux psycho-lunatiques »… Il montre pourtant de l’intérêt pour Albert le Grand, Éliphas Lévi ou Nicolas Flamel et demande à Smith des lectures où il pourrait puiser quelques bonnes idées ou des formules convenables pour ses histoires.
Dès 1919 il assiste aux réunions et réceptions littéraires à Boston et sa région, en 1920 il découche pour la première fois depuis 1901. Au décès de sa mère la tutelle parentale passe à ses tantes qui lui laissent davantage de liberté pour une vie sociale. Il fait des séjours à New York, et y vivra de 1924 à 1926. Il visite le Nord-Est, la Géorgie, la Louisiane, la Floride, le Québec… Sa production littéraire s’en ressent.
Si dans certains lettres Lovecraft se présente en reclus dans d’autres, bien plus nombreuses il évoque ses voyages. Il se fait hôte pour des visiteurs, comme W. Paul Cook, éditeur du fanzine The Vagrant, qui le convainquit d’écrire de nouveaux contes.
La production personnelle de HPL venait après sa correspondance, et ses révisions, pour lesquelles il touchait une faible mais capitale rémunération. L’argent était une pénible nécessité dont il ne pouvait se dispenser. Il faisait le minimum nécessaire, et parfois refusait d’intéressantes proposition, comme celle de devenir le rédacteur en chef de Weird Tales, refusant de s’installer à Chicago. Il refusait de couper, ou modifier, ses textes afin de les « adapter » au public visé par un éditeur. Il ne proposa jamais ces contes refusés à d’autres revues où elles auraient pu trouver un accueil plus favorable et lui offrir de plus intéressant débouchés. Sans parler de ceux qu’il ne proposa jamais parce qu’il aurait dû pour cela les dactylographier.
Peut-être agir autrement serait-il entré en contradiction avec l’idée qu’il se faisait du créateur. Ainsi écrivait-il, le 13 mai 1923 l « Pour moi l’artiste idéal est un gentleman montrant son mépris de la vie en continuant les façons de faire tranquilles de ses ancêtres, en laissant son imagination libre d’explorer les sphères resplendissantes et étonnantes. De même je verrais assez bien un auteur ignorer complètement son époque et le public, créer de l’art, non pas pour la renommée ni pour les autres mais pour sa seule satisfaction ». (Mis à part le « gentleman » et les « ancêtres », voilà une phrase que je pourrais faire mienne!)

Le 24 juillet 1925 alors que sa situation financière est difficile il évoque sa (presque) résolution de ne plus écrire de contes, de seulement rêver sans faire cette chose vulgaire que serait la transcription de ses visions à destination d’un public de porcs. Il poursuit, comme une suite à la missive citée ci-dessus : « […] l’écriture ne doit jamais être considérée que comme un art élégant, auquel on doit s’adonner sans régularité et avec discernement. Je suis désormais entièrement un spectateur de la vie, un simple dilettante, dont le plaisir consiste à contempler le passé et à jouir de l’agréable douceur d’une retraite pastorale géorgienne. »
Heureusement Lovecraft était protégé du monde extérieur, par sa mère d’abord, ses tantes ensuite. Son épouse ne tint ce rôle que brièvement, elle ne pouvait faire plus d’autant que son mari trouvait les manifestations érotiques repoussantes et cause probable de décadence nationale. Pour lui une « vision fantastique réellement puissante est d’origine masculine ». Une femme n’était pas une motivation à montrer le meilleur de lui-même.
La lecture de certaines lettres laisse planer un doute alternatif, avait-il un désir de paternité empêché par un complexe de castration ou s’agit-il d’homosexualité refoulée ? Qu’il ait taxé cette particularité de dégoûtante ne dit pas le contraire.

Dans les courriers de cette époque, après son échec new-yorkais, il exprime son mépris des masses, sa fierté de pouvoir être qualifié de réactionnaire, sa méfiance devant le libéralisme ou le progrès. Pour lui « bien » et « mal » sont des concepts primitifs ne supportant pas l’épreuve de la science de sang froid… on trouve dans une lettre du 10 février 1923 des remarques qui auraient pu figurer dans Mein Kampf alors que celui-ci n’était pas encore rédigé.

Racisme, antisémitisme… cela est présent dans maintes missives de cette époque, une vision plus globale de la correspondance de Howard indique une évolution de son point de vue, plus il connaît le monde, plus il fréquente des gens différents, plus son caractère évolue, un peu. Lovecraft projette probablement dans son œuvre ses idées, pensées, obsessions et autres craintes dues à son milieu, son éducation, ses échecs, son caractère… soulignant qu’une explication n’est pas une excuse, moins encore chez quelqu’un d’intelligent. Le génie de Lovecraft fut sans doute de transmuter en art l’ombre qui l’habitait, elle était sur le seuil, il sut ne pas la laisser entrer.

INFLUENCES

Enfant Lovecraft a des lectures dont on pourrait dire qu’elles ne sont pas de son âge, que ce soit Nathaniel Hawthorne, Thomas Bulfinch ou Coleridge dont il découvre La complainte du vieux marin dans une édition illustrée par Gustave Doré, il a alors six ans ! À huit ans il fait une rencontre décisive pour son avenir de littérateur : Edgar Allan Poe. Il avouera dans une lettre à Bernard Austin Dwyer du 3 mars 1927 que ce fut sa perdition. Ses premiers contes, qui sont arrivés jusqu’à nous, seront fortement marqué par cette influence, que ce soit La Bête de la caverne (1905), L’Alchimiste (1908) ou La Tombe (1917). Style et construction sont typiques du grand Edgar.  »Lorsque j’écris des histoires, Edgar Allan Poe est mon modèle. Je ne choisis jamais des sujets normaux et je traite surtout de sujets surnaturels » (20 01 1916).

En 1919 Howard découvre lord Dunsany, celui-ci ouvre de nouvelles perspectives à son imagination. Il retrouve chez cet auteur les contes de son enfance et lui emprunte l’idée d’une mythologie imaginaire évolutive au fil des récits. Les histoires
dunsaniennes sont regroupées dans le  »cycle des Contrées du rêve ».  »Vraiment Dunsany m’a influencé plus que quiconque à l’exception de Poe – la richesse de sa langue, son point de vue cosmique, son monde onirique lointain et son sens délicat du fantastique, tout cela me touche plus que n’importe quoi d’autre dans la littérature moderne. Ma première rencontre avec lui – pendant l’automne de 1919 – a donné un immense élan à ma façon d’écrire ; peut-être le plus grand que j’aie jamais connu… » (30 07 1923)  »Celephais, Sarnath, Iranon, le Bateau blanc et les autres Dieux […] sont mes œuvres les plus dunsaniennes » (11 01 1923)

Dernier  »parrain » de HPL : Arthur Machen, découvert en 1923 sur la recommandation de Frank Belknap Long et la lecture de The Hill of Dreams.  »Machen est un titan – peut-être le plus grand auteur vivant – et il faut que je lise tout de lui. Mais Dunsany c’est moi, plus un art et une culture infiniment supérieurs. Son royaume cosmique est celui dans lequel je vis ;
ces visions distantes, sans émotions, de la beauté du clair de lune sur d’étranges toits anciens sont les visions que je connais et que j’aime. » (3 juin 1923)  »Il y a chez Machen une extase de la peur que tous les autres hommes vivants sont trop obtus ou trop timides pour saisir, et que Poe lui-même n’a pas réussi à envisager dans son côté anormal le plus nu. » (8 janvier 1924)
À l’auteur gallois Lovecraft emprunte l’idée que le monde visible en contient un autre, invisible et peuplé d’entités de nature indéfinie, d’origine inconnue mais aux intentions hostiles dont certains humains cherchent à se concilier les bonne grâces de manière plus ou moins, surtout plus, violente et sanguinaire. Il le dépassera en sortant du mystère pour entrer dans l’angoisse et la terreur. Chez le premier les ombres s’effacent, chez le second elles l’emportent finalement et détruisent qui les a vues. Howard a structuré en cosmogonie ses créatures, les hiérarchisant et les plaçant proches de nous, il suffit d’ouvrir les yeux au mauvais moment pour les apercevoir, et n’avoir que le temps de le regretter avant de disparaître.
Lovecraft sera également marqué par Oscar Wilde qui, dans sa préface au Portrait de Dorian Gray, souligne l’importance de l’art pour l’art. Nietzsche, Spengler… Lister les auteurs qui le marquèrent, peu ou prou, serait fastidieux. Durant sa période  »léthargique », de 1908 à 1913 la lecture, d’ouvrage de fiction comme de sciences, sera sa compagne la plus fidèle. Les ingrédients se sont mélangés dans son esprit qui sut en tirer la recette d’œuvres plus grandes que celles de ses initiateurs.

Lettres 1

Lettres

Recueillies par August Derleth et Donald Wandrei

Choix, préface, chronologie, bibliographie et notes par Francis Lacassin

Traduit de l’américain par Jacques Parsons

Tome I (1914 – 1926)

Il est (presque) permis de dire que la correspondance fut pour Lovecraft une activité littéraire importante, autant, sinon plus, que ses textes d’imagination. Le nombre précis de ses écrits dans ce domaine est d’au-moins quelques dizaines de milliers, jusqu’à cent mille pour les plus optimistes. Sont intégrés à ces chiffres l’intégralité des formes et support possibles, du simple billet à la missive de plusieurs pages, en passant par les cartes postales qu’il envoyait de ses villégiatures.

Cette production est irremplaçable pour connaître et comprendre le natif de Providence tant il y parle de lui, de sa vie, de ses rêves, de ses contes et du reste. Ainsi apparaît-il devant nous, véritable sans doute, authentique peut-être. Un auteur est-il toujours sincère dans son courrier, sans penser à une postérité possible mais à l’image de lui qu’il souhaite donner à son correspondant. Il revient sur son enfance, son hérédité, sa famille, se confie parfois, un témoignage parfois à charge mais toujours intéressant pour voir l’homme derrière l’écrivain, dégagé des masques que d’autres posèrent sur lui.

Dès 1898, dans sa maison natale du 454, Angell Street, Howard prend la plume. Dès cet âge, il reconnaît ne plus croire au surnaturel, y incluant la foi chrétienne dans laquelle sa famille s’enferme. Les miracles de la Bible l’ennuie, il leur préfère les prodiges amoraux et flamboyants de la mythologie gréco-romaine.

À la différence des enfants de son âge, il vit la nuit, dort le jour, observe le ciel quand ses camarades grimpent aux arbres, éditant un « journal » polycopié. Quand ils jouent, lui préfère son laboratoire de chimie et les déclinaisons latines. Plutôt qu’à la séduction des fillettes de son âge, il cède à celle des volumes anciens de la bibliothèque des Phillips dans lesquels il a découvert la sexualité et la reproduction humaine. Dès lors ceux-ci ne présentèrent plus aucun intérêt pour lui.

En 1914 il entame sa correspondance avec les membres de l’association d’écrivains amateurs qu’il vient de rejoindre. Il y reconnaît que pour lui l’Histoire s’est arrêtée en 1776, se présente comme un Ancien perdu dans une époque qui ne lui correspond pas. Il n’a que 24 ans ! « Tout ce que j’aimais est mort depuis deux siècles ou deux millénaires. Je ne suis nulle part à ma place » (octobre 1916). Il observe ses contemporains comme il regarde les étoiles, de loin : « Lorsque je me dissocie de l’humanité et que j’examine le monde je peux analyser avec plus d’exactitude des phénomènes qui, de près, me dégoûteraient » (16 mai 1926). « Je n’appartiens pas au monde. J’en suis le spectateur amusé et quelquefois dégoûté. Je déteste la race humaine avec ses faux-semblants et ses grossièretés' » (février 1924). « L’homme est issu d’une détestable vermine – une malédiction sur cette planète ou tout au moins un incident banal sans signification profonde' » (7 février 1924).

Posture d’un homme d’autrefois qu’il reconnaît dans une lettre à Clark Ashton Smith « J’aurai 33 ans le mois prochain et je joue déjà le rôle du vieux gentleman tranquille, bienveillant. […] Je me suis demandé si rien dans l’existence ne méritait le sacrifice de la simple placidité et la liberté à l’égard des émotions fortes, et j’ai ainsi végété très tranquillement, en étant plus un épicurien dans le sens historique strict qu’un hédoniste de l’école d’Aristippe de Cyrène – ce que semblent être la plus grande partie des modernes » (30 juillet 1923).

Il sème des citations latines à des correspondants ignorants de cet idiome, étale sa culture en faisant allusion à des auteurs et autres personnages historiques arrachés à des livres que nul homme de son temps ne devait connaître. Jouer le vieil érudit semble le ravir, bien que ses commentaires fussent parfois erronés. Quand il évoque son labeur sur Épouvante et surnaturel en littérature, il lui arrive de se tromper, de recopier ce qu’il lut sur des œuvres qu’il ne parcourut jamais. Visiblement il connaît mal la littérature française, sauf peut-être Théophile Gautier qui avait été traduit en anglais.

Quelques exégètes virent, ou plutôt, voulurent voir, en lui un initié à des savoirs prodigieux et cosmiques ; dans ses lettres il s’affirme volontiers un « matérialiste absolu […] sans une parcelle de foi dans aucune forme de surnaturel ». Il ne craint pas de moquer l’occultisme « un culte de timbrés s’adressant à des marginaux psycho-lunatiques »… Il montre pourtant de l’intérêt pour Albert le Grand, Éliphas Lévi ou Nicolas Flamel et demande à Smith des lectures où il pourrait puiser quelques bonnes idées ou des formules convenables pour ses histoires.

Dès 1919 il assiste aux réunions et réceptions littéraires à Boston et sa région, en 1920 il découche pour la première fois depuis 1901. Au décès de sa mère, la tutelle parentale passe à ses tantes qui lui laissent davantage de liberté pour une vie sociale. Il fait des séjours à New York et y séjournera de 1924 à 1926. Il visite le Nord-Est, la Géorgie, la Louisiane, la Floride, le Québec… Sa production littéraire s’en ressent.

Si dans certaines lettres Lovecraft se présente en reclus dans d’autres, bien plus nombreuses, il évoque ses voyages. Il se fait hôte pour des visiteurs, comme W. Paul Cook, éditeur du fanzine The Vagrant, qui le convainquit d’écrire de nouveaux contes.

La production personnelle de HPL venait après sa correspondance, et ses révisions, pour lesquelles il touchait une faible mais capitale rémunération. L’argent était une pénible nécessité dont il ne pouvait se dispenser. Il faisait le minimum nécessaire, et parfois refusait d’intéressantes propositions, comme celle de devenir le rédacteur en chef de Weird Tales, refusant de s’installer à Chicago. Il refusait de couper, ou modifier, ses textes afin de les « adapter » au public visé par un éditeur. Il ne proposa jamais ses contes refusés à d’autres revues où elles auraient pu trouver un accueil plus favorable et lui offrir de plus intéressants débouchés. Sans parler de ceux qu’il ne proposa jamais parce qu’il aurait dû pour cela les dactylographier.

Peut-être agir autrement serait-il entré en contradiction avec l’idée qu’il se faisait du créateur. Ainsi écrivait-il, le 13 mai 1923 : « Pour moi l’artiste idéal est un gentleman montrant son mépris de la vie en continuant les façons de faire tranquilles de ses ancêtres, en laissant son imagination libre d’explorer les sphères resplendissantes et étonnantes. De même je verrais assez bien un auteur ignorer complètement son époque et le public, créer de l’art, non pas pour la renommée ni pour les autres mais pour sa seule satisfaction ». (Mis à part le « gentleman » et les « ancêtres », voilà une phrase que je pourrais faire mienne !).

Le 24 juillet 1925, alors que sa situation financière est difficile, il évoque sa (presque) une résolution de ne plus écrire de contes, de seulement rêver sans faire cette chose vulgaire que serait la transcription de ses visions à destination d’un public de porcs. Il poursuit, comme une suite à la missive citée ci-dessus : « […] l’écriture ne doit jamais être considérée que comme un art élégant, auquel on doit s’adonner sans régularité et avec discernement. Je suis désormais entièrement un spectateur de la vie, un simple dilettante, dont le plaisir consiste à contempler le passé et à jouir de l’agréable douceur d’une retraite pastorale géorgienne. »

Heureusement Lovecraft était protégé du monde extérieur, par sa mère d’abord, ses tantes ensuite. Son épouse ne tint ce rôle que brièvement, elle ne pouvait faire plus d’autant que son mari trouvait les manifestations érotiques repoussantes et cause probable de décadence nationale. Pour lui une « vision fantastique réellement puissante est d’origine masculine ». Une femme n’était pas une motivation à montrer le meilleur de lui-même.

La lecture de certaines lettres laisse planer un doute alternatif, avait-il un désir de paternité empêché par un complexe de castration ou s’agit-il d’homosexualité refoulée ? Qu’il ait taxé cette particularité de dégoûtante ne dit pas le contraire.

Dans les courriers de cette époque, après son échec new-yorkais, il exprime son mépris des masses, sa fierté de pouvoir être qualifié de réactionnaire, sa méfiance devant le libéralisme ou le progrès. Pour lui « bien » et « mal » sont des concepts primitifs ne supportant pas l’épreuve de la science de sang froid… On trouve dans une lettre du 10 février 1923 des remarques qui auraient pu figurer dans Mein Kampf alors que celui-ci n’était pas encore rédigé.

Racisme, antisémitisme… cela est présent dans maintes missives de cette époque, une vision plus globale de la correspondance de Howard indique une évolution de son point de vue, plus il connaît le monde, plus il fréquente des gens différents, plus son caractère évolue, un peu. Lovecraft projette probablement dans son œuvre ses idées, pensées, obsessions et autres craintes dues à son milieu, son éducation, ses échecs, son caractère… soulignant qu’une explication n’est pas une excuse, moins encore chez quelqu’un d’intelligent. Le génie de Lovecraft fut sans doute de transmuter en art l’ombre qui l’habitait, elle était sur le seuil, il sut ne pas la laisser entrer.

Les livres maudits

Les livres maudits existent, contrairement à ce que beaucoup veulent nous faire croire ! Vous en avez probablement entendu parler, que ce soit du Livre de Sable ou du Le Roi en Jaune. Ne croyez pas ceux qui les affirment inventés mais méfiez vous des éditions circulant sur le Net, ce ne sont souvent que des réalisations ayant pour but de noyer la réalité dans une surproduction de faux grotesques diffusés par des margoulins.

Parmi les éditions des vrais textes quelques-unes se distinguent par l’aura de maléfices qui les entoure et leur aspect légendaire si rassurant pour qui pense que le monde se limite à ce qu’il en voit.

L’œuvre de Lovecraft semble être imaginaire, il n’en est rien, nous le savons bien, et celle-ci est parsemée d’allusions à des textes interdits, que ce soit le Livre d’Eibon aux origines hyperboréennes trop floues, Le Culte des goules, du comte d’Erlette, De Vermis Mysteriis de Ludvig Prinn pour ne citer que les plus importants. Ceux-ci pourtant sont plus des compilations de légendes et de formules qui se voudraient magiques mais sont plus proche de délires nés de l’usage de produits dont il m’est interdit de parler ici. Et c’est dommage… Les recueils de magie noire existent depuis longtemps, ils ont survécu à la traque de l’Inquisition et autres polices cultuelles, alors que leurs contenus sont rarement intéressants.

Un texte se distingue de ceux-là, un ouvrage qui est une véritable porte sur des mondes que nous ne devrions pas entrevoir, auxquels nous ne devrions même pas penser, vous en connaissez le titre : le NECRONOMICON.

Son auteur est identifié, le poète dément Abdul Al-Hazred, dont la vie fut mouvementée, qui eut l’opportunité d’approcher les savoirs dont il parle dans son texte. Il aurait été rédigé vers 730, du calendrier chrétien, à Damas. Son titre original, Al Azif, ferait référence au bruit produit la nuit par les insectes, à moins que ce ne soient les murmures des djinns. Al-Hazred disparut en 738 dans des conditions atroces.

Son manuscrit aurait alors disparu, détruit peut-être, mais après avoir été copié car, vers 950, Philetas de Constantinople produit une traduction en grec. Il lui donne alors le titre sous lequel il est connu de nos jours. En 1228 Olaus Wormius le traduit en latin. Ces deux traductions furent interdites par le pape Grégoire IX en 1232. Il va sans dire que le Vatican conserve précieusement quelques exemplaires dans ses caves. Ceux qui sont accessibles sont rares, partiels, et dans des traductions diverses plus ou moins fiables. La langue d’origine est l’arabe, celui de l’époque, et de la région de son rédacteur, bien loin de la langue parlée de nos jours, différente même de l’arabe littéraire. Il est dit pourtant que sa lecture peut rendre fou ne serait-ce qu’en en déchiffrant quelques mots alors même que leur signification est inaccessible, tant leur pouvoir d’invocation est grand. HPL lui-même dans sa première allusion à ce livre n’en donne pas le nom, il évoque seulement sa découverte dans les ruines d’une cité oubliée par un explorateur découvrant des fresques atroces puis les momies de créatures reptiliennes.

À quel savoir son auteur eut-il accès ? Vit-il ce dont il parle, eut-il accès à des textes archaïques, sumériens, mésopotamiens ? Probablement faut-il répondre oui à ces deux questions. Quel est son contenu réel ? Relation de l’existence de créatures sur- et in- humaines, les  »Grands Anciens », des rites que d’anciens humains auraient suivi à l’aube de l’humanité ? Certains affirment qu’il contient le moyen de ressusciter les morts, de voyager dans le temps, d’invoquer Yog-Sothoth… 

Lovecraft put-il parcourir un exemplaire ? Possible, l’Université de Miskatonic est connue pour posséder un cabinet secret à l’intérieur même du département interdit de sa bibliothèque.

Si vous le voyez ne le touchez pas, si vous le touchez ne l’ouvrez pas, si vous l’ouvrez ne le lisez pas, si vous le lisez… nulle force au monde ne vous sauverait. Mais, c’est ce que vous venez de faire, sans vous en apercevoir…

Il est déjà trop tard !

Lovecraft & Houellebecq

« Peut-être faut-il avoir beaucoup souffert pour apprécier Lovecraft. »
Jacques Bergier

Michel Houellebecq est inconnu quand, en 1988, il entreprend la rédaction de cet essai. Celui-ci sera édité en 1991, un an avant La Poursuite du bonheur, premier recueil de poèmes de l’auteur. Son premier roman, L’Extension du domaine de la lutte, paraîtra en 1994. Houellebecq dans sa préface de 1999 avouera qu’il écrivit ce texte comme un premier roman, HPL en étant le seul personnage et les faits relatés devant être exacts.
On peut comprendre qu’il considère Lovecraft comme un miroir, se penchant sur ce reflet pour privilégier les traits qu’il devine les plus proches de lui au détriment des autres pour donner au final un portrait tronqué du Maître de Providence.

Le titre est en lui-même explicite, c’est l’attitude supposée de Lovecraft face au monde dans lequel il est plongé, son œuvre étant une réaction contre celui-ci et l’incompréhension, sinon le rejet, qu’il ressentit, à tort ou à raison. Le (anti-)héros lovecraftien type étant confronté à des puissances qu’il ne comprend pas mais dont il sait qu’elles vont le détruire, un peu comme Howard lui-même lors de son séjour à New York, ville où il débarque, marié à Sonia Green, plein d’ambition, sûr d’un avenir radieux, avant de déchanter, d’affronter l’incompréhension des autres et sa propre incapacité à s’adapter à un contexte étranger. Houellebecq peut, à juste titre, considérer que ces choses inhumaines sont les projections du monde moderne, du capitalisme, du mercantilisme et des sous-produits de ceux-ci.

Pour l’auteur, Lovecraft était un enfant jusqu’à 17/18 ans, isolé par une éducation qui rendra impossible son entrée à l’université et son accession à une vie  »normale ». HPL se confronte à une réalité hostile. Il connaîtra alors un  »effondrement nerveux » causant une léthargie qui se prolongera dix ans.

Howard, dans une lettre à Alfred Galpin en mai 1918, confie  »Je ne suis qu’à moitié vivant ; une grande partie de mes forces se dépense à s’asseoir et à marcher […] je suis complétement abruti sauf quand je tombe sur quelque chose qui m’intéresse particulièrement.’‘ Aucun doute, Lovecraft est un homme lucide, intelligent et sincère. Une espèce d’épouvante léthargique s’est abattue sur lui au tournant de ses dix-huit ans et il en connaît parfaitement l’origine.

Conséquence, peut-être, de ces échecs, Lovecraft présente un monde, une humanité, dénués d’intérêt et d’avenir.  »L’univers n’est qu’un furtif arrangement de particules élémentaires. Une figure de transition vers le chaos qui finira par l’emporter. La race humaine disparaîtra. […] Les actions humaines sont aussi libres et dénuées de sens que les libres mouvements des particules élémentaires. Le bien, le mal, la morale, les sentiments ? Pures fictions victoriennes. ». Dans cette phrase Houellebecq parle plus de lui que du sujet de son texte, elle en est d’autant plus intéressante mais ce n’est pas le lieu de la commenter.

Houellebecq souligne à quel point le créateur de Cthulhu utilise la science, moyen d’augmenter la crédibilité de ses personnages.  »Les sciences, dans leur effort gigantesque de description objective du réel lui fourniront cet outil de démultiplication visionnaire dont il a besoin. HPL, en effet, vise à une épouvante objective, déliée de toute connotation psychologique ou humaine. ».
De même la sexualité, qui est pour l’étasunien une cause de dégénérescence, d’abâtardissement, est l’origine des maux de l’homme moderne pour le Français.

Le titre se comprend donc comme une double confrontation, d’abord avec la société contemporaine, ensuite avec une vie dont il ne perçoit pas l’intérêt, pour lui d’abord, pour l’espèce dont il est un représentant, peut-être en le regrettant.

Par ailleurs ses convictions matérialistes et athées ne varieront pas, la vie n’a pas de sens, la mort non plus. Ainsi celle de ses héros n’apporte-t-elle aucun apaisement, l’histoire ne s’arrête pas avec elle. Lovecraft aurait-il soulevé le rideau de la réalité, révélant quelque chose d’ignoble ? Au-delà de notre perception d’autres entités existent, d’autres créatures, races, concepts et intelligences. Satan ou Nyarlathothep, qu’importe ! Le premier est dévalué par ses rapports prolongés avec les détours honteux de nos péchés ordinaires.
Lire Lovecraft amène à modifier son regard sur l’existence.

Houellebecq pourtant n’est pas un continuateur comme le furent Robert Bloch, Lin Carter, August Derleth… il n’a pas participé au mythe populaire généré par l’Américain, aussi vivace que le fut celui de Conan Doyle à la différence, importante, que si le second se fonde sur un personnage, le premier en use tels des ombres sur fond de ténèbres hantées de formes insupportables. L’un avait conscience de ce qu’il créait, pas l’autre. Quelle importance que son œuvre disparaisse avec lui ! Il a pourtant des disciples, jeunes auteurs qu’il s’efforce de conseiller, non sans tenter de les décourager parfois, tant sa propre vie fut difficile.

Houellebecq distingue trois cercles dans l’œuvre de son modèle : Le premier, le plus extérieur, est constitué de la correspondance et des poèmes. Le deuxième comprend les textes auxquels Lovecraft a participé, comme collaborateur officiel ou comme réviseur. Le suivant est fait des textes de la main de HPL, ici chaque mot compte. Le dernier enfin, le cœur absolu, les  »grands textes » :
L’appel de Cthulhu (1926)
La couleur tombée du ciel (1927)
L’abomination de Dunwich (1928)
Celui qui chuchotait dans les ténèbres (1930)
Les montagnes hallucinées (1931)
La maison de la sorcière (1932)
Le cauchemar d’Innsmouth (1932)
Dans l’abîme du temps (1934)

L’œuvre de Lovecraft est comparable à une gigantesque machine à rêver, d’une ampleur et d’une efficacité inouïes. Son impact sur la conscience du lecteur est d’une brutalité sauvage, effrayante ; et ne se dissipe qu’avec une dangereuse lenteur.

Vous voulez en savoir plus ? Vous savez ce qui vous reste à faire, d’autant que ce livre est petit, il demande pourtant du temps pour être lu, et même relu. L’auteur y évoque HPL, apporte un éclairage personnel, et intéressant, sur celui-ci, et à travers lui se présente et montre une esquisse de sa production littéraire à venir.

Robert Bloch

Une œuvre éclipse parfois un nom, surtout si à celle-ci un autre patronyme est associé. Il en va ainsi de Robert Bloch, quand à l’œuvre c’est Psychose. Ce mot évoque sûrement quelque chose pour vous, le film d’Alfred Hitchcock, ce dernier le porta à l’écran, avec un tel résultat qu’il semble en être l’auteur.

Vous voyez Marion Crane s’arrêter devant un motel, être reçue par un jeune homme qui semble bien sous tout rapport, vous vous souvenez de la scène de la douche, de la musique de Bernard Herrmann…

Dommage pour Bloch ! La genèse de ce roman vaudrait un article, il viendrait en conclusion de la série Bates Motel. Mais ce n’est pas le sujet !

Robert Bloch naît le 5 avril 1917 – le Printemps Lovecraft tombe on ne peut mieux –, il vit à Chicago dans un milieu où se côtoient violence et prohibition dans un cadre bétonné si laid qu’il en gardera l’horreur des cités modernes. Très tôt l’écriture l’intéresse, il participe aux réunions des Milwaukee Fictionners et en 1932 écrit à Lovecraft pour exprimer tout le bien qu’il pense de ses textes et demander des conseils. Probablement n’espère-t-il pas de réponse, sa surprise est donc grande quand il en reçoit une. Il ignore encore que Howard est un épistolier (presque) compulsif et aime conseiller et aider les jeunes écrivains. En 1934 il est publié par Weird Tales où paraissent plusieurs de ses amis et relations. Lovecraft lui montre comment rédiger une nouvelle.

Bloch l’explique lui-même : Alors que j’étais jeune, je commençais à lire les histoires de Lovecraft dans Weird Tales. À 15 ans je lui écrivis et lui demandais où trouver ses textes que je n’avais pu me procurer. Non seulement il m’envoya ses propres exemplaires mais en plus m’adressa une liste de livres de littérature fantastique qu’il possédait dans sa bibliothèque et qu’il mettait à ma disposition ! Ainsi je devins le correspondant et l’ami de l’homme que je considère comme le plus grand écrivain contemporain de fantastique en Amérique, si ce n’est dans le monde entier. Je lui envoyais régulièrement mon travail, il lisait mes histoires puis les commentait ; il me donna la permission de m’inspirer de lui pour le caractère d’un de mes personnages dans  »The Shambler From the Stars ».

Lovecraft répondit à son jeune correspondant en l’incluant, sous le nom de Robert Blake, dans sa nouvelle Celui qui hantait les ténèbres. Après la mort de son maître, Bloch ajouta un troisième texte, L’ombre du clocher.

Bloch rédige de nombreuses et excellentes nouvelles, il participa au Mythe de Cthulhu en inventant le livre maudit De Vermis Mysteriis, attribué à Ludwig Prinn, Lovecraft le glissera dans plusieurs de ses contes. Le natif de Chicago est aussi, et comme HPL, un admirateur d’Edgar Allan Poe.

Il finira par s’éloigner du fantastique pour s’attaquer à la science-fiction avant de se consacrer au roman policier. En 1959 Hitchcock lui achète les droits de son roman Psychose pour en faire un de ses films les plus célèbres. Bloch travaillera pour le cinéma mais aussi pour la télévision. Entre autres il utilisera plusieurs fois notre ami Jack l’Éventreur.

En 1979 Bloch retrouvera le chemin menant à Arkham, publiant Strange Eons, qui en français deviendra Retour à Arkham. Dans ce roman le héros découvre un tableau qui s’avère être celui du Modèle de Pickman. Lovecraft lui même apparaît au détour d’un chapitre, et le texte de se conclure par une fin digne de l’homme de Providence. Je ne vous en dis pas plus.

Les deux auteurs partagent une vision similaire du genre humain face à des forces que l’auteur ne comprend pas alors qu’elles ne se soucient pas de lui. Bloch y rajoute de l’humour, noir, et de l’ironie (forcément) que son  »parrain » n’exprimait pas, du moins par écrit.

Il est bon de parler d’un écrivain injustement méconnu, si j’ai ainsi contribué à lui apporter quelques lecteurs supplémentaires j’en serais ravi. Si vous n’en faisiez pas partie faites attention à ce qui pourrait vous arriver.

Robert Bloch est décédé le 23 septembre 1994. 

Chuchotements dans la nuit de Lovecraft

« À écouter la nuit, seul, à la lumière d’une bougie… » dit Lee Rony.

Dans l’émission Fictions / Samedi soir le samedi de 20 heures à 21 heures, il est possible d’écouter en podcast des nouvelles de Lovecraft comme Chuchotement dans la nuit (1930) ici mais aussi d’autres nouvelles et émissions ici.

Dans une nouvelle traduction de François Bon ; consultez son site Le tiers livre !

L’appel de Lovecraft

Billet publié sur Lire au nid le 15 mars 2017.

Lovecraft est parti rejoindre les Grands Anciens il y a déjà 80 ans, en temps terrestre. Pour obtenir Leurs bonnes grâces et avoir une chance de survivre quand Ils reviendront. PatiVore a eu l’idée d’un Printemps Lovecraft appelant le maximum d’humains à se pencher sur l’œuvre du maître de Providence. Appel auquel j’ai répondu immédiatement.

Ce printemps ira du 15 mars au 21 juin, 99 jours où chacun sera invité à poser sur son blog, ou Facebook (Bouc… si bien nommé !) articles et autres interventions.

Selon leurs participations les impétrants recevront les grades suivant :

Nyarlatotep : au moins un billet (hors celui de présentation).

Hastur : de 2 à 5 billets,

Cthulhu : de 6 à 10 billets,

Azatoth : de 11 à 15 billets.

Il n’est pas recommandé de dépasser ce nombre sous peine de sentir son esprit préférer la démence à une trop grande connaissance de secrets qu’il n’est pas capable de dominer.

Des logos sont disponibles pour illustrer ces participations, libre pourtant à chacun de créer le sien.

L'appel de LovecraftL'appel de Lovecraft
L'appel de Lovecraft
L'appel de Lovecraft

Tant de phrases que j’aurais pu écrire, mais qui, de les avoir lues, m’ont influencé d’une manière… indicible. Forcément !

[…] notre race humaine n’est qu’un incident trivial dans l’histoire de la création : l’humanité est peut être une erreur, une excroissance anormale, une maladie du système de la Nature.

Ce qui est, à mon sens, pure miséricorde en ce monde, c’est l’incapacité de l’esprit humain à mettre en corrélation tout ce qu’il renferme. Nous vivons sur une île de placide ignorance, au sein des noirs océans de l’infini, et n’avons pas été destinés à de longs voyages. Les sciences, dont chacune tend dans une direction particulière, ne nous ont pas fait trop de mal jusqu’à présent ; mais un jour viendra où la synthèse de ces connaissances dissociées nous ouvrira des perspectives terrifiantes sur la réalité et la place effroyable que nous y occupons ; alors cette révélation nous rendra fous, à moins que nous ne fuyions cette clarté funeste pour nous réfugier dans la paix et la sécurité d’un nouvel âge de ténèbres.

Les hommes doués intellectuellement savent qu’il n’y a pas de différence nette entre le réel et l’irréel, que les choses ne nous apparaissent qu’à travers la délicate synthèse physique et mentale qui s’opère subjectivement en chacun de nous. Mais le matérialisme prosaïque de la majorité condamne comme folie les éclairs de voyance qui déchirent, chez certains, le voile habituel de l’empirisme banal. Extrait de La tombe.

Certaines qualités vocales sont le propre des hommes, d’autres le propre des bêtes; rien n’est plus terrifiant que d’entendre les unes jaillir de la gorge des autres.

Il y aura toujours une certaine proportion de gens qui ressentiront une curiosité brûlante à propos des espaces extérieurs inconnus, et un désir brûlant d’échapper à la prison du connu et du réel, pour atteindre ces pays enchantés de l’aventure incroyable que nous ouvrent les rêves […]

« Il y a des horreurs au-delà des limites de la vie, dont nous n’avons pas idée, et les prières diaboliques d’un homme peuvent en un instant les faire surgir dans notre propre réalité. »

Ma première impression n’était qu’un aspect de l’éternelle tendance humaine à détester, craindre et repousser ce qui est radicalement différent.« 

« Ce que je m’attendais à trouver m’était très progressivement devenu clair, mais d’y parvenir était près de paralyser l’ensemble de mes facultés. »

Qui a jamais écrit une histoire où l’homme est considéré comme une tare du cosmos qu’il faut éliminer ?

L’émotion la plus ancienne et la plus forte de l’humanité est la peur. Et le genre le plus ancien et le plus fort de la peur est la peur de l’inconnu.

L’ironie participe, souvent même, aux pires horreurs.

Nul ne saurait décrire le monstre ; aucun langage ne saurait peindre cette vision de folie, ce chaos de cris inarticulés, cette hideuse contradiction de toutes les lois de la matière et de l’ordre cosmique.

Malheureux celui auquel les souvenirs d’enfance n’apportent que crainte et tristesse.

Il y a des horreurs, aux frontières de la vie, que nous ne soupçonnons pas, et de temps à autre, la funeste curiosité d’un homme les met à portée de nous nuire.

Il est très malheureux que l’humanité dans son ensemble soit trop limitée dans sa vision morale pour peser avec patience et intelligence des phénomènes isolés, éprouvés seulement par quelques individus au psychisme particulièrement pénétrant, et qui, par leur exceptionnelle sensibilité, se situent bien au-delà de l’expérience commune.

L’endroit était vieux, si vieux, avec des étagères montant aux plafonds, remplies de volumes pourrissants.

Il est absolument indispensable, pour la paix et la sécurité de l’humanité, qu’on ne trouble pas certains recoins obscurs et morts, certaines profondeurs insondées de la Terre, de peur que les monstres endormis ne s’éveillent.

Être précautionneux est le premier réflexe de ceux qui sont habitués à croise occasionnellement l’imposture, voire la charlatanerie. » à une nouvelle vie.

Les rêves sont en nous tous ; mais peu de mains peuvent saisir leurs ailes de papillon sans les anéantir.

C’est une chose de pourchasser une entité sans nom, mais autre chose est de la trouver.

Tu as été mon seul ami sur cette planète, la seule âme qui m’ait deviné et recherché dans la répugnante dépouille gisant sur cette couche.

N’est pas mort ce qui à jamais dort

Et au long des siècles peut mourir même la mort !

Propulsé par WordPress.com.

Retour en haut ↑